Si je vous dis qu’en parlant de hochets je cite la Légion d’honneur, je vais entendre mes oreilles siffler ! Pourtant, je
ne fais que répéter une conversation de Napoléon. Bien évidemment, je n’y étais pas, vous vous en doutez, donc je me fie à quelques lectures.
Comme certains y voyaient une atteinte au principe de l’égalité civique, Bonaparte, en conseil d’État justifie cette institution : «Je vous défie de me montrer une république, ancienne ou moderne, qui savait se faire sans distinctions. Vous les appelez les hochets, et bien c’est avec des
hochets que l’on mène les hommes.»
A tout bien penser, ce n’est pas faux, mais sans brocarder une publicité, avons-nous aujourd'hui les mêmes
valeurs ?
Sous Napoléon, avec la vertu, l’honneur, l’héroïsme ou la bravoure on
obtenait la Légion d’honneur. Aujourd’hui, je vous laisse remplir les cases (1) :
…………………… / …………………… / …………………… / …………………… /
Toutes ces histoires de Légion d’honneur accordée à tel ou tel me lassent. (Ne suivez pas mon
regard !... Vous savez de qui je veux parler car on se couche avec, on se réveille avec et on vit la plus grande partie de la journée avec … ces informations (2)).
Y’en a MARRE !... Même si le contexte est un peu plus particulier que d’habitude, ne croyez-vous pas que chaque gouvernement en place a
distribué bien des … hochets !.. pour récompense et non pour services rendus à la nation ! Ce n'est pas une nouveauté. Ce n'est pas une excuse non plus, j'en
conviens...
Cependant cette vindicte médiatique m'effraie. Sommes-nous si bas tombés que nous ne puissions connaître les
faits que par la presse et ses scandales ?
Un peu d'histoire :
La naissance de la Légion d’honneur est la loi du 19 mars 1802 (29 floréal an X) par laquelle Napoléon
Bonaparte, premier Consul, crée un ordre qui soit « le signe de la vertu, de l’honneur, de l’héroïsme, une distinction qui serve à la fois la bravoure militaire et
au mérite civil ».
La Légion d'honneur est le premier ordre national - La première promotion officielle de légionnaires date du 24
septembre 1803, l'insigne, « la Croix », date de 1804. Une première remise d'insignes par Napoléon, devenu empereur des Français, a lieu à Saint Louis des
Invalides le 15 juillet 1804. Une seconde cérémonie a lieu à Boulogne-sur-Mer le 16 août 1804.
Les principes d'origine de 1802 n'ont en rien été modifiés. L'appartenance à l'Ordre est « la récompense
de mérites éminents acquis au service de la nation, soit à titre civil, soit sous les armes, toujours sous le signe de l'honneur et dans la fidélité à la Patrie ».
Certains courent plus vite que leur ombre pour se faire décorer, mais il en est qui la
refuse.
Le curé d’Ars, saint Jean-Marie Vianney, reçut la croix de chevalier de la Légion d’honneur en 1855, à son insu : la demande en
avait été faite par le sous-préfet de Trévoux et le préfet de l’Ain. Il la refusa au motif que la croix ne rapporterait pas d’argent pour les pauvres...
Jean Victor Marie Moreau se moquait de l’institution de la Légion d’honneur. Quelqu’un lui disait qu’on avait dessein de donner la croix, non
seulement à ceux qui se seraient distingués par la gloire des armes, encore à ceux qui se seraient fait remarquer par leur mérite et par leur savoir. Il s’écria : « Eh bien ! Je
vais demander la croix de commandeur de l’ordre pour mon cuisinier, car il a un mérite supérieur dans l’art de la cuisine. »
Les collaborateurs du Canard enchaînése sont donné depuis toujours comme règle de refuser les décorations, au premier rang desquelles la Légion d’honneur (Pierre
Scize, journaliste, fut renvoyé du journal en 1933 pour l’avoir acceptée bien qu'elle lui fut décernée à titre militaire.)
Le dramaturge Népomucène Lemercier refusant de prêter serment à l’Empereur et à sa
dynastie,
La Fayette,
Le poète Jean-François Ducis (qui préférait « porter des haillons
que des chaînes)
Mgr Maurice de Broglie,
Gérard de Nerval,
Nadar,
George Sand (qui écrivit au ministre qui lui proposait la croix : « Ne faites pas cela cher ami, je ne
veux pas avoir l’air d’une vieille cantinière ! »),
Honoré Daumier (qui déclara : « Je prie le gouvernement de me laisser
tranquille ! »),
Émile Littré,
Gustave Courbet,
Guy de Maupassant,
Maurice Ravel (qui refuse immédiatement cette distinction, sans donner de justification),
Pierre et Marie Curie (Pierre, à qui l’on proposait la croix, rétorqua simplement :
« Je n’en vois pas la nécessité »),
Claude Monet,
Georges Bernanos
Eugène Le Roy,
Jean-Paul Sartre,
Simone de Beauvoir,
Albert Camus,
Antoine Pinay
Brigitte Bardot (qui est décorée en 1985 mais refuse d’aller la chercher),
Catherine Deneuve,
Claudia Cardinale.
Hector Berlioz, auquel l’État désargenté voulait payer une messe de Requiem avec le ruban rouge au lieu de verser les
3 000 francs promis, s’écria : « Je me fous de votre croix. Donnez-moi mon argent ! ».
Des poètes anarchistes comme
Jacques Prévert,
Georges Brassens qui en fit une chanson.
Léo Ferré, qui a brocardé « ce ruban malheureux et rouge comme la honte ».
Geneviève de Fontenay, la présidente du Comité Miss France qu’un sénateur de Savoie voulait proposer, l’a aussi refusée pour des raisons
inverses : « C’est vraiment désacraliser le ruban que de le distribuer à n’importe qui… comme des médailles en chocolat. »
L’écrivain Bernard Clavel a fait savoir qu’il refusait de recevoir la Légion d’honneur,
préférant rester « dans le clan de ceux qui l’ont refusée ». Il a ajouté que son oncle Charles Clavel l’avait reçue parce qu’il avait
abondamment versé son sang pour son pays dans une terrible guerre : « Je pense qu’il se retournerait dans sa tombe en me voyant porter le même ruban que
lui. » C’est également le cas de
Philippe Séguin, dont le père est mort sans la recevoir.
En 1949, le ministère de l'Éducation nationale propose la décoration Ã
Marcel Aymé. La réponse donnée par l'écrivain est restée célèbre. Il termine son article par ces mots : « [...] pour ne plus me trouver dans le cas d'avoir à refuser d'aussi désirables faveurs, ce qui me cause nécessairement une grande peine, je les prierais qu'ils voulussent bien,
leur Légion d'honneur, se la carrer dans le train, comme aussi leurs plaisirs élyséens»
Le sculpteur résistant René Iché, décoré comme
chevalier pour 1914-1918, refusa la promotion d’officier en 1947 estimant que cette décoration perdait tout sens s’il la recevait en tant qu’artiste ou en tant que résistant pionnier de
1940.
Certaines personnes choisissent d’accepter la décoration mais refusent de la porter, par
exemple
Jean d'Ormesson, de l’Académie française qui déclarait : « Les honneurs, je les méprise, mais je ne
déteste pas forcément ce que je méprise ».
Erik Satie écrit à propos du refus de la décoration par Maurice Ravel : « Ravel
refuse la Légion d'honneur, mais toute sa musique l'accepte. »
Lorsque Aragon la refuse, Jacques Prévert, feignant la sévérité, lui
dit : « C’est très bien de la refuser, mais encore faudrait-il ne pas l’avoir méritée. »
Edmond Maire la refusa en déclarant : « Ce n’est pas à l’État de décider ce qui est honorable ou
pas. »
Michèle Audin, mathématicienne, fille du mathématicien Maurice Audin (1932-1957), refuse le grade de chevalier de la
Légion d'honneur au motif de l'absence de réponse du président Sarkozy à la lettre ouverte envoyée par sa mère demandant que soit éclairci le mystère de la disparition de son mari en Algérie et
que la France assume sa responsabilité
Le 5 janvier 2009, les journalistes politiques Françoise Fressoz (Le Monde)
et Marie-Eve Malouines (France Info) ont annoncé refuser la décoration : « Rien, dans mon parcours professionnel, ne justifie pareille
distinction. Je pense en outre que, pour exercer librement sa fonction, un journaliste politique doit rester à l’écart des honneurs. Pour ces raisons, je me vois dans l’obligation de refuser
cette distinction.
Jean Guillou, organiste, l'a refusée en juillet 2010, ne considérant la Légion d'honneur que comme un « accessoire
honorifique».
(1) Bien entendu, je sais qu'il existe des personnes recevant la Légion d'honneur qui la méritent cent fois. Vous avez compris que je suis
"fâché" contre ces remises de hochets à ceux qui ne correspondent en rien aux vertus souhaitées par Napoléon : les mérites éminents militaires ou civils rendus à la nation, puisque telle est encore à ce jour, la définition pour l'obtention de cette décoration.
(2) Affaire PdM /
W.
Tout savoir sur la légion d'honneur
Citations politiques de Napoléon
Bonaparte
Napoléon.org
Sources :
wikipedia.org